Chalcolestes viridis

Lestes viridis (Vander Linden, 1825) ( = Chalcolestes viridis ) : le leste vert

C'est certainement le leste le plus répandu. On peut le rencontrer sur une grande variété d'eaux stagnantes ou calmes (étangs, fossés, cours d'eau lents). Ca reste toutefois une espèce discrète de par sa coloration vert sombre uniforme, dépourvue de pruinosité bleue. De plus, il se perche souvent plus haut dans la végétation que les autres zygoptères. C'est une espèce plutôt tardive, que l'on pourra observer jusqu'en octobre. 

On le retrouvera dans les buissons au moment de la reproduction (fin août - septembre). En effet, contrairement à la majorité des odonates qui pondent dans l'eau ou à proximité immédiate, la femelle de L. viridis va insérer ses oeufs dans l'écorce des branches d'arbres à bois tendre (principalement des saules et des aulnes) qui surplombent l'eau. On pourra donc voir les tandems posés sur les branches, parfois en groupes nombreux. Au moment de l'éclosion, la jeune larve se laissera tomber dans l'eau. 

Par rapport aux autres lestes, L. viridis a certaines originalités qui lui valent d'être souvent classé dans un genre différent : Chalcolestes. Il se distingue par sa taille supérieure, sa coloration vert sombre qui prend des reflets bronze avec l'âge et qui couvre largement le coté du thorax et de l'abdomen. Sur le coté du thorax, le bord inférieur de la coloration vert sombre présente une "dent" caractéristique, utile notamment pour identifier la femelle. Vu de dessus, les pièces copulatoire du mâle forment une pince régulièrement arrondie, fine et claire ; les cerques sont à peine visible. Les pterostigma sont grands et marron clair.


 

Lestes macrostigma

Lestes macrostigma (Eversmann, 1836) : le leste à grands stigmas

C'est l'espèce la plus rare du genre. Elle est inféodée aux eaux peu profondes colonisées par le scirpe maritime, avec une salinité bien présente. Son écologie particulière la limite aux marais littoraux, aux dépressions d'arrière dune, et à de rares eaux continentales. Son aire de répartition est donc très fragmentée. Pour la France, elle n'est présente qu'en Camargue, sur le littoral atlantique entre Loire et Gironde, et en Corse. 

C'est une espèce facile à reconnaître quand  on a la chance de la rencontrer. En effet, le mâle comme la femelle portent une pruinosité bleue très étendue sur la tête et le thorax, ainsi qu'aux deux extrémités de l'abdomen. La couleur verte du fond est sombre. De plus, le pterostigma est long et sombre (d'où le nom d'espèce !), et l'oeil parait également sombre. 

Je l'ai rencontrée par hasard à deux endroits en Andalousie, dans le parc national de Donana (delta du Guadalquivir). 

Sympecma fusca

Sympecma fusca (Vander Linden, 1820): le leste brun, la brunette hivernale

Cette espèce est une originale parmi toute notre odonatofaune !

En effet, c'est la seule qui passe l'hiver à l'état adulte, y compris dans des contrées septentrionales où les températures sont souvent négatives. De plus, cet hivernage peut avoir lieu loin de tout point d'eau. Ainsi, même en Lorraine, il n'est pas rare d'en voir voler par une belle journée ensoleillée de janvier ou février le long d'une lisière bien exposée, ou parmi les herbes sèches d'une pelouse à orchidées !  Il faut quand même avoir l'oeil affûté pour la repérer, car le leste brun peut compter sur son mimétisme pour se protéger des prédateurs. S'il ne bouge pas, il est difficilement repérable. 

Ce n'est qu'au printemps que les adultes vont revenir au bord de l'eau pour se reproduire. Les biotopes qu'ils fréquentent regroupent toutes les eaux stagnantes ou faiblement courantes, surtout s'il y a des accumulations de débris végétaux. L'émergence a lieu en début d'été, suivie par la dispersion des imagos.

En France, l'espèce ne peut pas être confondue, de par sa coloration brune. Plus à l'est, il existe une autre espèce très proche (S. paedisca), qui a été citée autrefois en Allemagne, pas très loin de la frontière française. Les deux espèces cohabitent sur une partie de leur aire. S. fusca peut être rencontré potentiellement partout en France et en Corse, sauf en montagne.
Par rapport aux autres membres de sa famille, on notera le fait que le leste brun garde ses ailes jointes au repos, comme les autres zygoptères. La forme pétiolée des ailes trahit son appartenance aux Lestidae. De profil, les pterostigmas des ailes antérieures et postérieures ne se chevauchent pas. 

Lestes virens

Lestes virens (Charpentier, 1825) : le leste verdoyant

C'est le plus gracile de nos Lestes. Il partage avec L. barbarus le fait d'avoir l'arrière de la tête jaune, ainsi qu'une affinité pour les milieux peu profonds qui s'assèchent. Les adultes sont cependant facile à identifier, en particulier le mâle qui a une répartition de la pruinosité bleue caractéristique : elle est limitée aux deux derniers segments de l'abdomen, le reste du corps étant vert métallique vu de dessus. La femelle est entièrement verte. Les pterostigmas sont brun clair uniforme, sauf dans certaines populations espagnoles. Chez le mâle, à l'extrémité de l'abdomen les cerques sont courts et droits. 

Deux sous-espèces sont distinguées en fonction de critères ténus concernant la répartition de la couleur verte sur le coté du thorax et du prothorax : la ssp. virens (péninsule ibérique, sud de la France, îles tyrrhénniennes) a une coloration verte un peu moins étendue que la ssp. vestalis, plus nordique. 

Lestes virens peut être rencontré partout en France, sauf à haute altitude et dans une zone allant de la Manche au Hauts-de-France. mais comme toutes les espèces ayant des besoins écologiques particuliers, elle est loclisée à l'intérieur de cette aire. Je l'ai rencontrée presque uniquement dans un biotope particulier, constitué de mares au sein d'une lande à bruyères, présent dans deux réserves naturelles : le Pinail dans la Vienne, et les pâtis du Ménil sur Oger, dans la Marne, où le cortège d'odonates et très semblable malgré la distance qui les sépare. 

Lestes dryas

Lestes dryas (Kirby, 1890) et Lestes sponsa (Hansemann, 1823) : le Leste dryade et le Leste fiancé

L. dryas et L. sponsa constituent un "duo infernal" pour l'observateur tant ils sont morphologiquement proches. De plus, ils affectionnent les mêmes biotopes, et cohabitent régulièrement. C'est pourquoi je les traite simultanément.

Les mâles partagent en effet le même schéma de coloration, avec une pruinosité bleue à la fois à la base et à l'extrémité de l'abdomen. Les femelles sont également uniformement vertes sur le dessus, tout comme celles de L. virens, mais l'arrière de la tête est sombre contrairement à cette dernière espèce. 
Je ne me risquerai pas personnellement à tenter de les différencier sans une observation précise. Il faut alors recourir à la capture pour ceux qui la pratiquent, ou à l'aide d'un appareil photo pour agrandir à l'écran les détails distinctifs. 

Chez le mâle, il faudra observer les pièces copulatoires à l'extrémité de l'abdomen, et plus précisément la forme des cerques. Chez L. dryas, l'extrémité est fortement aplatie et dirigée vers l'intérieur. Chez L. sponsa, les cerques sont un peu aplatis mais presque droits et à pointe étroite. A la base de l'abdomen, le 2e segment est totalement bleu chez L. sponsa, partiellement bleu chez dryas, mais ça n'est pas un critère absolu. 

Sur la femelle, il faut observer l'extrémité de l'abdomen de profil. Chez L. dryas, l'ovipositeur est long, et dépasse le segment S10 à l'extrémité de l'abdomen. Chez L. sponsa, il est plus court que l'abdomen, s'arrêtant à l'aplomb de l'extémité de S10. La femelle de dryas est plus robuste que celle de sponsa, mais ça n'est pas un critère aisé à utiliser, surtout si les deux espèces ne sont pas présentes smultanément. 

Ces deux Lestes fréquentent les eaux stagnantes entourées d'hélophytes, mais L. dryas est plus lié aux milieux temporaires, ou s'asséchant au moins partiellement. A un endroit donné, L sponsa est plus tardif de quelques semaines. Les deux peuvent être présents partout en France à l'exception des basses plaines méditerranéennes, L. dryas est également absent de Normandie et Hauts-de-France.